L’écrivaine française Christine Angot a écrit de nombreux livres, mais Inceste (1999) est sans doute celui pour lequel elle est la plus célèbre. Diversement défini par Angot et d’autres comme un roman mais aussi comme une œuvre de non-fiction autobiographique (certains l’appellent « autofiction »), il met en scène une protagoniste également nommée Christine qui, tout comme Angot, a une fille nommée Léonore, un ex-mari. nommé Claude, et un père biologique qui a commencé à violer Christine les week-ends et les jours fériés lorsqu’elle avait 13 ans. Le tome, assez expérimental par endroits, a suscité un accueil controversé dans le monde littéraire français et n’a été traduit en anglais qu’en 2017, mais il est considéré comme une contribution extrêmement influente au discours partout dans le monde sur les traumatismes sexuels, en particulier dans l’enfance, et surtout lorsqu’il s’agit d’inceste.

Aujourd’hui âgée d’une soixantaine d’années, Angot a réalisé son premier film documentaire, Une famille (Une Famille), même si ce n’est pas sa première incursion dans le cinéma. Deux scénarios d’elle, Laissons entrer le Soleil et Les deux côtés de la lameont été adaptés en longs métrages par Claire Denis, ce dernier film étant une adaptation du roman d’Angot Un tournant de la vie.

Une famille

L’essentiel

Déchirant mais absorbant.

Lieu: Festival du Film de Berlin (Rencontres)
Avec: Christine Angot, Léonore Chastagner, Rachel Schwatz-Laberrigue, Claude Chastagner, Charly Clovis, Emmanuel Asmar
Réalisateur/scénariste : Christine Angot

1 heure 22 minutes

Réalisé avec la collaboration artistique, selon le générique de fin, de la célèbre directrice de la photographie Caroline Champetier (Moteurs sacrés), Une famille revient au traumatisme fondamental abordé dans Inceste et dans un sens, met l’histoire à jour. On ne peut pas exactement dire que cela met un terme à l’affaire. Mais à la fin, nous observons Angot et sa fille Léonore comprendre à quel point ce que le père d’Angot a fait s’est répercuté tout au long de la vie d’Angot. Léonore s’excuse avec empathie pour ce que sa mère a vécu, et on a le sentiment qu’une page se tourne lentement ou même qu’un chapitre se termine.

À en juger par les interactions vues plus tôt dans le film, ce moment de paix a été durement gagné et difficile à atteindre. Dans les premières minutes, nous rencontrons Angot dans un important salon du livre près de Strasbourg pour dédicacer des exemplaires de ses livres. C’est la même ville où vivait son père, aujourd’hui décédé, et une femme qui l’avait rencontré une fois mais connaissait la femme qu’il a épousée et les demi-frères et sœurs de Christine s’approchent d’Angot pour lui dire qu’ils sont de bonnes personnes, la réprimandant implicitement pour ce qu’elle a écrit à leur sujet.

Mais Angot se souvient de ce qui s’est passé quand elle avait 13 ans, et alors qu’elle décrit l’hôtel où les abus ont eu lieu pour la première fois, le film présente des images de Christine avec Léonore bébé, en train d’être nourries, de trottiner sur une pelouse, de jouer avec son père, l’ex d’Angot. , Claude. Clairement, Angot a beaucoup de films amateurs, tournés en VHS, sur les premières années de Léonore et, tout au long, elle entremêle ces images douces et anodines tournées pour la plupart par Claude avec des scènes où elle confronte divers personnages clés de sa vie.

La première est sa belle-mère Elizabeth Weber, à qui Angot et son équipe de tournage ont effectivement fait un pas de porte, insistant pour qu’elle les laisse entrer pour s’en sortir. À contrecœur, Elizabeth s’exécute et les deux femmes ont une conversation très animée mais finalement rationnelle sur le passé. Une femme âgée élégante avec une maison aux couleurs rigoureusement coordonnées, pleine de peintures et haute bourgeoise bibelots, Elizabeth insiste poliment sur le fait qu’elle ne reconnaît pas le portrait qu’Angot peint dans ses écrits de son père comme le même homme avec qui elle a été mariée. Elle ne nie jamais ce dont Christine l’accuse ; elle insiste simplement sur le fait qu’il lui est difficile de tout concilier.

Mais ce n’est pas vraiment suffisant pour Angot. Visiblement extrêmement agitée par la situation, elle se révolte à peu près tout ce que dit Elizabeth, du maladroit « Je te plains » jusqu’à la description même de ce qui s’est passé entre le père et la fille comme une « relation ». Non, ils n’avaient pas de relation, répond-elle, c’était un viol, ou plutôt une série de viols qui se poursuivaient, même lorsqu’elle était adulte.

Ailleurs, la mère de Claude et Angot, qui a eu Christine hors mariage et s’est battue pour que son père reconnaisse son enfant au sens juridique, sont toutes deux critiquées de la même manière pour avoir mal parlé du traumatisme de Christine de manière subtile, ou pour ne pas avoir fait preuve de sympathie de la bonne manière. . Malgré le fait qu’elle soit reconnue comme réalisatrice, Angot ne se rend pas toujours service ici. Elle apparaît souvent comme très épineuse et émotionnellement à la peau crue, ce qui est compréhensible bien sûr, mais cette surveillance constante de la façon dont les autres devraient parler commence à sembler malsaine plutôt que curative ou corrective.

D’autres spectateurs peuvent bien sûr ne pas être d’accord, mais comme l’écriture d’Angot, le film dans son ensemble a la qualité d’un miroir magique, comme tant d’histoires d’abus ; chacun voit quelque chose de légèrement différent se refléter sur la surface, en fonction de sa propre expérience.

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