Un personnage central du thriller dérangeant de Pascal Plante est un homme à l’allure de souris, le genre de personnage anonyme auquel on ne prêterait pas un second regard, jugé pour les meurtres brutaux de trois adolescentes, qu’il a diffusés en direct sur le dark web. Et il n’est même pas la personne la plus effrayante à l’écran Rouge Pièces (Les Chambres rouges).

Ce serait Kelly-Anne, jouée à la perfection glaciale par Juliette Gariépy. Pour des raisons jamais expliquées dans le film — présenté au Festival international du film de Karlovy Vary — la mannequin à succès Kelly-Anne est devenue obsédée par Ludovic Chevalier (Maxwell McCabe-Lokos, personnifiant la banalité du mal), dont l’affaire est entendue à Montréal. salle d’audience.

Chambres rouges

L’essentiel

Si vous trouvez les meurtriers effrayants, essayez les groupies de meurtre.

Lieu: Festival international du film de Karlovy Vary (compétition Globe de cristal)
Jeter: Juliette Gariépy, Laurie Babin, Elisabeth Locas, Natalie Tannous, Pierre Chagnon, Guy Thauvette, Maxwell McCabe-Lokos
Réalisateur-scénariste: Pascal Plante

1 heure 58 minutes

Bien que le tueur soit masqué dans deux des vidéos de tabac à priser (la troisième est restée introuvable), il y a une prépondérance de preuves contre Chevalier, qui est assis seul dans une cabine comme un Adolf Eichmann des temps modernes. Il est d’autant plus terrifiant par son attitude impassible, l’air vaguement ennuyé par la procédure.

Kelly-Anne se présente tous les jours à la salle d’audience, vraisemblablement pour soutenir Chevalier, surnommé par les médias le «démon de Rosemont», bien que le mannequin n’exprime jamais ses sentiments d’une manière ou d’une autre à qui que ce soit.

C’est en contraste frappant avec sa camarade tueuse en série groupie, l’adolescente Clémentine (Laurie Babin), qui insiste sur l’innocence de Chevalier et proclame haut et fort son indignation à l’idée qu’il se fasse piéger à qui veut l’entendre. Alors que le procès progresse avec son contenu horriblement graphique, la mère d’une victime déclare son dégoût aux partisans improbables de Chevalier : « Vous crachez sur la tombe de notre fille.

Unis par leur intérêt commun, les deux femmes forment un lien. Kelly-Anne invite Clémentine, manifestement sans-abri, à s’écraser chez elle, un appartement stérile dans un immeuble de grande hauteur moderne offrant une vue magnifique et le bruit constant du vent sifflant. Kelly-Anne se révèle être une as de la technologie, sa vie étant gérée par une IA conçue sur mesure nommée « Guinevere », qui répond à chaque commande vocale, racontant même des blagues pas si mauvaises à la demande.

Bien que sérieusement malavisée dans ses convictions, l’immature Clémentine montre au moins des signes d’humanité, s’effondrant dans l’hystérie après avoir appelé dans un talk-show télévisé tabloïd et est rapidement humiliée par l’hôte. Kelly-Anne, d’autre part, est aussi impartiale que son assistante IA, ne révélant ses conflits internes que lorsqu’elle se pousse jusqu’à l’épuisement lors d’une séance d’entraînement. C’est une qualité qui lui sert bien dans son métier, dans lequel elle apparaît comme un magnifique mannequin vierge. Il en va de même pour son concert parallèle au poker en ligne, où son absence d’émotion fait d’elle une gagnante constante.

Puisant dans la tendance bizarre des femmes à devenir amoureuses des tueurs en série qui n’a fait que croître de plus en plus dans les temps modernes, le film nous permet de deviner où va l’histoire – à la fois en termes de relation symbiotique entre les deux femmes et jusqu’où Kelly-Anne ira dans la poursuite de son obsession, même au prix de perdre sa carrière.

La réponse est finalement révélée dans une scène d’audience inquiétante lorsqu’elle fait un geste dramatique et est récompensée par Chevalier montrant son intérêt pour la première fois. C’est à ce moment-là que l’histoire prend une toute autre direction fascinante.

Scénariste-réalisateur franco-canadien Plante — dont le dernier long métrage, Nadia, papillonétait une sélection cannoise 2020 – démontre un contrôle stylistique puissant sur son matériel provocateur, des visuels élégamment froids et des effets sonores inquiétants (ce vent sifflant semble résonner dans l’âme creuse de Kelly-Anne) à la partition étrange de Dominique Plante, qui ressemble à une fugue de Bach en panne.

Les performances de tête sont encore plus impressionnantes. Babin est déchirant en tant que Clémentine confuse, qui répond à la gentillesse de Kelly-Anne comme l’enfant incertain qu’elle est vraiment, rendant son personnage en quelque sorte sympathique même à son plus strident. Et Gariépy, magistrale dans son exactitude émotionnelle et physique, est une révélation dans le rôle de l’énigmatique Kelly-Anne, dont le contrôle rigoureux sur elle-même et son environnement masque une compulsion maladive dont nous ne pouvons que deviner les origines.

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