Dans leur merveilleux doc 2020 Les chasseurs de truffes, Michael Dweck et Gregory Kershaw se sont enfoncés au cœur des collines boisées du Piémont pour observer le mode de vie en voie de disparition d’une poignée de villageois italiens ruraux et de leurs chiens, reniflant les tubercules aromatiques prisés par les meilleurs restaurants du monde. Le nouveau long métrage des cinéastes vérité, Gaucho Gaucholes emmène dans un endroit encore plus suspendu dans le temps, dans la région montagneuse de Salta, au nord-ouest de l’Argentine, pour capturer la passion, la spiritualité et la profonde symbiose avec la nature d’une communauté de cowboys et de cow-girls honorant les valeurs traditionnelles.

Le film suit sept volets principaux, chacun captivant à sa manière et chacun accédant à des personnages qui savourent très clairement leur liberté par rapport à la société contemporaine. Mais les véritables stars sont les magnifiques images en noir et blanc prises par Dweck et Kershaw. Le sens de la composition des coréalisateurs leur permet de trouver une magie visuelle et un sens dramatique saisissant dans chaque image.

Gaucho Gaucho

L’essentiel

Chaque tir est un KO.

Lieu: Sundance Film Festival (compétition documentaire américaine)
Directeurs: Michael Dweck, Gregory Kershaw

1 heure 24 minutes

La portée cinématographique de cette œuvre savamment conçue est amplifiée par ses choix musicaux éclectiques. (Félicitations au superviseur musical Jonathan Finegold.) La bande originale aurait presque pu être tirée du juke-box d’un bar poussiéreux de cow-boys latino-américains hors des sentiers battus, avec un glorieux ajout d’opéra. Ce serait « Au fond du temple saint » de Bizet. Les pêcheurs de perlesqui accompagne majestueusement une première séquence au ralenti de cowboys à cheval galopant à travers les plaines, leurs chiens courant derrière eux.

Ailleurs, la musique s’étend du folk argentin, cubain et vénézuélien en passant par le hit intemporel de « La Balsa », le premier single des rockeurs argentins Los Gatos en 1967, jusqu’aux chansons d’artistes freak-folk contemporains comme Devendra Banhart et Alex Ebert, dont « Truth » comporte des éléments sifflants et choraux qui évoquent les westerns de Sergio Leone.

Fidèles à l’approche observationnelle caractéristique des coréalisateurs, les sujets ne sont jamais interviewés mais plutôt capturés dans des moments calmes de solitude, s’occupant de leurs animaux, s’occupant de la terre ou en conversation avec leur famille et d’autres membres de la communauté.

Ils sont de tous âges, de « Jony », un garçon précoce de 5 ans s’imprégnant avec impatience de chaque pépite de tradition gaucho que son père Solano peut transmettre, à Lelo, un vétéran de 83 ans avec une longue barbe enneigée, racontant des histoires de son passé de vin, de femmes et d’errance, jurant qu’il recommencerait s’il le pouvait.

Le personnage le plus coloré est Santino, un chanteur, danseur, présentateur de rodéo et DJ qui anime une émission de radio sur la tradition gaucho intitulée « Our Roots ». Orateur né, il grimpe sur un arbre pour annoncer l’aube sur les vallées Calchaquí. Les préadolescents Lucas et Pancho profitent des vacances scolaires d’été pour voyager loin à cheval et camper sous les étoiles. L’éleveur de bétail Wally surveille son troupeau alors qu’une sécheresse prolongée réduit progressivement son cheptel et que d’énormes condors survolent sa région, attendant de s’attaquer aux veaux non protégés.

Chacun de ces fils produit des images spectaculaires, soulignant l’unité des gauchos avec le paysage.

La piste la plus convaincante suit sans doute Guada, 17 ans, désireuse de prouver son courage de dresser des chevaux et de concourir sur le circuit du rodéo machiste. Dans une première scène, nous la voyons vêtue d’un pantalon gaucho, d’espadrilles, d’un bandana et d’un béret, traînée devant un responsable du lycée pour avoir refusé de porter l’uniforme réglementaire. Elle dit résolument : « Je ne me sens à l’aise qu’avec des vêtements de gaucho. » Tout au long du film, nous assistons à ses progrès à mesure qu’elle apprend à gagner la confiance d’un cheval, lui permettant éventuellement de s’allonger sur le dos de l’animal ou de se tenir debout. Et nous partageons ses premières expériences lors d’événements compétitifs.

Une scène délicieuse montre l’entraînement de Guada sur une version très rudimentaire d’un taureau mécanique – un baril de pétrole attaché par une corde aux arbres et secoué dans différentes directions par quatre hommes. Les scènes de rodéo regorgent d’énergie cinétique, faisant encore une fois un superbe usage du ralenti, alors que les chapeaux des cavaliers s’envolent tandis qu’ils rebondissent sur le dos de chevaux déterminés à les rejeter.

La mère de Guada craint que d’éventuelles blessures lors d’un rodéo ne l’empêchent d’avoir des enfants, mais ce cœur à cœur contraste de manière poignante avec un bel intermède dans lequel l’adolescente est assise en face de son père à la table de la cuisine alors que celui-ci exprime sa fierté envers elle, lui apprenant le l’importance de regarder et d’écouter.

Le processus d’enseignement, de partage des connaissances entre générations, est un motif émouvant, en particulier dans les moments de tendresse entre Solano et Jony, montrant au garçon comment aiguiser des couteaux ou tresser des cordes.

Il y a de l’humour doux dans les échanges du conteur Lelo avec le prêtre local alors qu’il contemple la mort d’un air neutre, et du mysticisme dans sa consultation de rue avec le chaman du village sur les limitations physiques de son âge. Une solennité religieuse plus conventionnelle joue également un rôle dans les scènes de gauchos du clan Choque plaçant des feuilles de coca et versant du vin sur un autel de pierre tout en priant pour la pluie, pour la terre, pour leurs familles et pour le rêve de pouvoir poursuivre leur choix. vie.

L’absence de commentaires, plutôt que de limiter notre connaissance des sujets, nous rapproche de l’éthos fier selon lequel ils vivent et de la pure joie qu’elle leur apporte, constituant un argument convaincant en faveur des récompenses de la vie hors réseau. Gaucho Gauchoun nom donné aux vrais praticiens, célèbre leur noble tradition avec une appréciation émouvante et des visuels qui évoquent John Ford.

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