L’amie tendue, la principale excentrique, le DJ semi-rebelle de la radio universitaire qui exploite le potentiel mélodique des tasses solo rouges: ce sont les rôles auxquels Anna Kendrick a été reléguée pendant la majeure partie de sa carrière, un mélange éclectique de véhicules largement comiques. Même après que l’actrice ait décroché une nomination aux Oscars pour son second rôle dans Dans l’airelle semblait, encore, plus encline à incarner une Beca qu’une Natalie.

Mais dans les débuts émotionnellement inquiétants de Mary Nighy Alice, chérie, transperce Kendrick, affirmant qu’elle a toujours eu de la profondeur et de la portée. L’actrice joue Alice, une femme rendue vulnérable et émotionnellement battue par une relation insidieusement abusive. Kendrick commence par canaliser une fragilité, comme si Alice était faite de porcelaine et que tout mouvement soudain de son petit ami Simon (Charlie Carrick) ou de ses amis Sophie (Wunmi Mosaku) et Tess (Kaniehtiio Horn) pouvait la briser. Puis sa performance, sous la direction assurée de Nighy, change. Il grandit, se rétracte et gonfle à nouveau, reflétant la bascule émotionnelle de la violence.

Alice, chérie

L’essentiel

Sensible et saisissant.

Lieu: Festival international du film de Toronto (gala)
Moulage: Anna Kendrick, Kaniethiio Horn, Wunmi Mosaku, Charlie Carrick
Directeur: Marie Nighy
Scénariste : Alanna Franci

1 heure 29 minutes

C’est à travers les compulsions d’Alice – tirer des mèches de cheveux, les enrouler étroitement autour de son index, compter les calories de manière obsessionnelle – que nous voyons la cruauté de sa relation. Nighy préfère la suggestion à l’explication. Grâce à de brefs flashbacks, habilement entrecoupés par l’éditeur Gareth C. Scales, nous comprenons que Simon, un peintre mercuriel, s’est intégré dans la psyché d’Alice. Il la hante – à tel point que lorsque Sophie et Tess invitent Alice à passer un week-end au chalet de Sophie, Alice dit à Simon qu’elle part en voyage d’affaires. Elle répète le mensonge pendant qu’il va chercher du café et des pâtisseries dans un café, sa récitation communiquant un autre niveau de peur et de désespoir.

Sur le chemin de la maison du lac, Alice n’arrête pas de penser à Simon. Le mensonge la ronge à chaque fois que son téléphone sonne avec un SMS de sa part. Son souhait apparemment simple pour elle d’avoir un vol en toute sécurité devient du fourrage pour ses angoisses. Un autre texto lui demandant si elle pense à lui est non seulement suspect, mais sinistre. Le style de communication frénétique de Simon – marqué par la fréquence, le timing et le ton de ses messages – est calculé et coercitif ; cela le garde dans l’esprit d’Alice même, et surtout, quand elle essaie de se libérer.

La plupart de Alice, chérie est situé dans la paisible ville rurale qui entoure le gîte. Lorsque le trio arrive, ils font un arrêt rapide dans un dépanneur, où Alice repère un dépliant pour une fille disparue. L’affaire locale consume notre protagoniste, qui se joint même aux efforts de l’équipe de recherche pour retrouver l’adolescent. C’est la partie la plus curieuse du scénario autrement pleinement réalisé et retenu d’Alanna Francis: il est difficile de discerner ce que l’affaire est censée nous dire sans détourner notre attention du récit déjà captivant d’Alice. Au fur et à mesure qu’Alice s’intéresse à l’affaire, son objectif semble de plus en plus obscur.

Ce qui est clair, c’est que la distance physique et le temps passé loin de Simon aident Alice à prendre du recul sur leur relation. Mais ce n’est pas un processus facile. Quelques jours après le début du voyage, Tess et Alice se lancent dans une bagarre dévastatrice qui les laisse toutes deux incertaines quant à leur amitié. Sophie, dévouée et maternelle, force l’affrontement en cachant le téléphone d’Alice et en laissant les femmes seules discuter. L’une des parties les plus absorbantes de Alice, chérie regarde Alice, Sophie et Tess interagir les unes avec les autres tout au long du week-end – pour assister aux moments frustrants d’incompréhension et aux moments triomphants de clarté. Kendrick, Mosaku et Horn entretiennent une relation naturelle, ce qui facilite l’investissement dans leur amitié. Nous supplions silencieusement Sophie et Tess de voir au-delà de la surface des éruptions de colère d’Alice et de sa tendance à s’isoler. Nous voulons qu’Alice se sente suffisamment en sécurité pour se confier à ses compagnons.

Leurs conversations tendues et leurs tendres moments sont guidés par la partition menaçante d’Owen Pallett. La musique tendue et ondulante est ce qui nous rapproche le plus du sentiment constant d’Alice d’une catastrophe imminente. La cinématographie non sentimentale de Mike McLaughlin aide à maintenir l’ambiance plaintive.

Sans son téléphone, Alice se détend, ce qui la fait parler davantage de sa relation avec Simon. Entendre les anecdotes des insultes, des plaintes et des accusations qu’il lui lance renforce les réflexions de Tess, Sophie et, par extension, du spectateur sur la profondeur des abus. Alice, chérie est un portrait de contrastes. En construisant régulièrement une impression de la façon dont les abus affectent le comportement d’Alice dans la première moitié, Nighy ajoute une couche urgente aux changements du personnage dans la seconde moitié. Alice se livre à des aliments sucrés, prend des photos à la fête d’anniversaire de Tess et rejette l’offre de ses amis de rendre son téléphone portable.

Le troisième acte de Alice, chérie est particulièrement saisissant dans la façon dont il utilise la tension précédemment construite. N’ayant pas eu de nouvelles d’Alice, Simon utilise des tactiques plus extrêmes pour la voir et tenter de rétablir la dynamique toxique. Mais Sophie et Tess ont aidé Alice à renouer avec elle-même, la nourrissant d’amour et renforçant leur lien. Cela s’avère être la grâce salvatrice d’Alice, lui donnant la permission et le pouvoir d’imaginer une vie sans Simon.

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